Concerts… ajout bienvenu [@mail en bas], si musique > 80% après 1941, pays Francophone, même format de données, avec lien-concert, '*' si création et '0€' si gratuit, max. 180 caractères +++
2024-12-15 - Di (15.00) | Abesses_Théâtre | Multilatérale_ensemble | Posadas (Ianus), Sciarrino (Venere ), Combier (Cordelia des Nuées, Strands*) - …+++
2024-12-10 - Ma (20.00) | Paris_Philharmonie | Intercontemporain_ensemble_Next_ensemble | Varèse (Ionisation, Densité 21, Offrandes, Octandre, Intégrales, Arcana, Amériques) - …+++
2024-12-04 - Me (20.00) | Paris_ChampsElysées | Ensemble_LesSiècles_Chœur_Unikanti | Poulenc (Dialogues des Carmélites, opéra, reprise Pi) - …+++
2024-11-25 - Lu (20.00) | Paris_Philharmonie | Modern_ensemble | Goebbels (A House of Call) - …+++
2024-11-21 - Je (20.00) | Paris_Philharmonie | Intercontemporain_ensemble | Grisey (Nout), Saariaho (Oi Kuu, 7 Papillons), Salonen (Meeting), Murail (Lettre Vincent) - …+++
Orchestre-Grand-Instrumental | Orchestre-Grand-Voix | Orchestre-Petit-Instrumental | Orchestre-Petit-Voix | Orchestre-Instrumental-Electronique | Orchestre-Voix-Électronique | Concerto-Piano | Concerto-Violon | Concerto-Alto | Concerto-Violoncelle | Concerto-Double-Plus | Concerto-Flûte | Concerto-Clarinette | Concerto-Autres-Bois-Vents | Concerto-Percussions | Concerto-Divers | Ensemble-Instrumental | Ensemble-Voix | Ensemble-Électronique | Ensemble-Voix-Électronique | Électro-Pure-Tous-Types | Chambre-Avec-Electronique | Chambre-Cordes-Quatuor | Chambre-Cordes-Quintet-Plus | Chambre-Divers | Chambre-Duos-Trios | Solo-Piano-Claviers | Solo-Cordes | Solo-Flûte | Solo-Clarinette | Solo-Vents-Bois | Solo-Autres | Voix-Solistes-Seules-Ou-Accompagnement | Voix-Solistes-Chambre | Voix-Choral-Seules-Ou-Chambre | Opera-Chambre | Opera-Theâtre |
COMPO | CRÉA | TITRE | ANALYSE | TPS | VAL | NIV | N |
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Amy (Gilbert) | 1989 | Orchestrahl (grand orchestre) [53 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, et même 8 cors). Une symphonie (sans le nom, jugé rétrograde à l'époque) en 4 mouvements, et un feu d'artifice de couleurs orchestrales qui allie douceur et blocs de manière assez unique ; dans l'ordre : (1, "Praeludium"), un prélude assez long (pour une entrée en matière), en fait plus du tiers du total, marqué d'abord par des appels de cuivres sur un tapis orchestral rutilant, puis par des contrastes qui avancent par vagues fluctuantes (comme le ressac), parfois en ralentissant, parfois en accélérant, en s'éparpillant puis en s'agglomérant jusqu'aux blocs (le milieu du mouvement se distingue par un hommage bref au "Rituel" de Pierre Boulez, et sa fin est astucieusement enchaînée au mouvement suivant par un fascinant diminuendo aux cordes, comme une expectative inaboutie), (2a, "Etale"), plus lent et étiré (comme la phase étale de la marée), calme mais frémissant ou frissonnant, avec des dialogues en échos et en saillies entre divers bois (flûte, hautbois, clarinette) et cors en sourdines, puis un crescendo très léger qui montre vite son impuissance avant le retour aux interrogations (2b, "Récitatif), un presque rondeau en presque variations, vif, aux arêtes irrégulières, séparé par des épisodes plus calmes, qui s'ouvre par une douce fanfare, aux bois, reprise plus tard aux altos (un festival de couleurs, ludique, presque narquois), (3, "Après Chant", qui s'enchaîne aussi au précédent), dans lequel plusieurs séquences du 1er mouvement réapparaissent après transformation des matériaux (les métamorphoses sont difficiles à décrypter), dans un mode plutôt chaotique mais très maîtrisé, qui renvoie une impression de globalité à la pièce, par retour sur elle-même, avant un bref final dans la sérénité ; une pièce phare de l'époque post-sérielle, tendance assagie, à l'orchestration brillante ; Extrait-Vidéo [création : partiellement, en 1986 et 1987, intégrale, en Novembre 1989, à Metz (France), puis révision en 1990 et 1995)] | 35 | xxx | +++ | N |
Andre (Mark) | 2007 | Auf I-II-III (grand orchestre) [43 ans] | Orchestre (grand, triptyque). Chaque pièce est indépendante et peut-être jouée séparément (mais la composition prend tout son sens dans la continuité) ; la première des 3 créations commence par des appels brefs, scandés, enfiévrés, et sans détente ; la musique smble tout le temps à l'arrêt et pourtant elle avnce inéxorablement (sans développement) ; pendant 10 minutes, le silence bruissant des cordes et de l'aluminium froissé, est interrompu par les assauts réguliers et fracassant de sonorités saisissantes (par exemple, vents, piano, cloches), qui installent des impulsions sonores étranges et étourdissantes ; dans un dernier tiers temps, la musique, plus lente, s'installe dans l'énigmatique scintillant, au bord de l'indicible, puis de la rupture, jusqu'au vide (discontinu) ; une pièce et un triptyque incomparables, solidement branché dans leurs temps ; Extrait-Vidéo [créations : I, 14 Décembre 2007, Munich (Allemagne), II, 26 Juillet 2007, Baden-Baden (Allemagne), Ensemble Modern, direction : Pierre Boulez, III, 21 Octobre 2007, à Donaueschingen (Allemagne), les 3 parties, 28 Mars 2009, Berlin, Philharmonie, Festival Märzmusik]. | 15 | xxx | +++ | N |
Bernstein (Leonard) | 1949 | Symphony The Age of Anxiety (grand orchestre) [31 ans] | Orchestre (grand, avec piano soliste, non concertant). Une œuvre magnétique par sa couleur grise et variée à la fois, la plus originale de ses 3 Symphonies ("Kaddish" est plus accessible), dans laquelle le piano n'est pas concertant, mais fondu dans l'orchestration ; le style est éclectique (jazzy, phrasé et gestuel) avec un scherzo joyeux décrivant une fête nocturne ; la pièce, inspirée par un long poème de W.H. Auden sur la recherche d'un sens à la vie et de la foi dans une existence vide et matérialiste, reste globalement plutôt pessimiste (même si l'épilogue est faussement moins crispé, par ironie) ; Extrait-Vidéo [création : 8 Avril 1949, à Boston (USA)]. | 36 | xxx | +++++ | . |
Bertrand (Christophe) | 2011 | Okhttor (orchestre) [30 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). Une pièce ultime, inaugurant un nouveau ton dans le catalogue du compositeur, plus pessismiste, plus grave (voire noir), tout en restant dans son esthétique spécifique et ses recherches modernistes (incomparable) ; Extrait-Vidéo [création (posthume) : 11 Février 2011, à Strasbourg (France)] | 13 | xxxx | +++ | N |
Birtwistle (Harrison) | 1972 | The Triumph of Time (grand orchestre) [38 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). La plus connue des pièces instrumentales du compositeur, inspirée par une gravure de Pierre Bruegel l'Ancien (montrant une procession illustrée par, séparément, la mort et la renommée) ; un long adagio en un seul mouvement (sans rapport avec Mahler, sauf l'idée elle-même), une procession funéraire, avec répétitions d'un motif au saxophone (amplifié), une longue mélodie au cor Anglais qui provoquent des débordements soudains d'énergie par blocs véhéments ; la couleur est une dimension clé de la pièce, plutôt sombre et dramatique (pas seulement des bois, mais aussi des percussions, et des pizzicati aux cordes) ou brillante par éclats ; musicalement, la pièce est une juxtaposition (brillante) d'objets sonores sans lien apparent autre que la continuité linéaire du sujet ou bien l'absence précisément de temps fixe pourtant promis dans le titre, donc l'exploration de l'indéfini insondable, tout un programme ; Extrait-Vidéo [création : 1er Juin 1972, à Londres (Angleterre)] | 27 | xxx | ++++ | . |
Birtwistle (Harrison) | 1986 | Earth Dances (grand orchestre) [52 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). Une pièce emblématique de la tendance à la complexité orchestrale (jusqu'à 56 lignes instrumentales pour 91 instrumentistes), mais sans perception complexe à l'audition (plutôt des climats contrastés, et bien sûr parfois dansants, le titre de la pièce se traduisant en "Danses de la Terre", au sens géologique du mot) ; s'ouvrant sur une série d'accords (caverneux) en clusters, aved des appels énigmatiques des trompettes, la pièce se développe par groupes, selon les registres plutôt que les couleurs, progresse avec des cahots (souvent des roulements de tambour) ; une musique primitive, aux rythmes pulsés non réguliers (une comparaison -journalistique- avec le "Sacre du Printemps" de Stravinsky a été proposée, mais sans ses côtés tribal et rituel, voire inéluctables, alors qu'ici le chaos semble le fruit du hazard, la puissance semble une méga-force incontrôlable, labyrinthique, cryptée) ; une musique énergique (tout en étant assez lente), qui puise son momentum dans le mouvement de plaques (comme la tectonique de la croûte terrestre) en (6) strates, superposées de façon croissante jusqu'à un climax pré-final vertigineux qui finit par se dissoudre en s'irisant ; Extrait-Vidéo [création : 14 Mars 1986, au Royal Festival Hall, Londres (Angleterre)]. | 34 | xxx | ++++ | . |
Boulez (Pierre) | 1958 | Figures Doubles Prismes (grand orchestre) [33 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre de facture classique dont les maladresses de composition ont été rectifiées en 1964 et 1968 et le contenu étendu, avec l'expérience de chef d'orchestre acquise (en partie seulement, car en 2008 le compositeur a déclaré vouloir revoir le début parce qu'à l'époque le compositeur pensait qu'un schéma suffisait à définir le caractère d'une pièce alors que ce n'est plus le cas, le schéma est trop simplifié pour donner le caractère recherché d'un moment musical) ; le style, caractéristique de Boulez, est fait de succession de mesures courtes, parfois brutales (comme des interjections) suivies de phrases longues déployant un groupe instrumental (avec, au concert, une spatialisation) ; le final est une grande réussite -ajout tardif- avec une mélodie ample, linéaire, allusion au Concerto de Violon "A la Mémoire d'un Ange" d'Alban Berg ; la pièce doit encore être révisée (au moins son début) ; Extrait-Vidéo [création de "Doubles" : 16 Mars 1958, à Paris, puis de la première version complète en triptyque, à Bâle, le 10 Janvier 1964]. | 20 | xxx | +++ | . |
Boulez (Pierre) | 1980 | Notations (grand orchestre) [55 ans] | Orchestre (grand). Un projet en devenir depuis 1978 pour «orchestrer» les 12 miniatures intitulées Notations pour piano de 1945 (orchestration fortement développée, car la durée est doublée) : aujourd'hui seules, les Notations 1, 2, 3, 4, 7 sont achevées et elles sont d'une maîtrise et d'une beauté sauvage extraordinaires ; la "1" modérée, mystérieuse et narquoise, la "2" très vive, déhanchée, festive, insistante, au finale époustouflant (devenue un «tube»), la "3" lente, méandreuse, suspendue, puis étirée, la "4" rythmique, chaotique, la "7" rêche et âpre (aussi, plus longue, environ 9 minutes) ; note : elles peuvent être jouées dans n'importe quel ordre, et en totalité ou indépendamment ; Extrait-Vidéo [créations : "1-4", 18 Juin 1980, salle Pleyel, à Paris (France), "7", 14 Janvier 1999, Chicago (USA)]. | 17 | xxxx | ++++ | . |
Chostakovitch (Dimitri) | 1972 | Symphonie n°15 (grand orchestre) [66 ans] | Orchestre (grand). Une des rares symphonies de Chostakovitch de structure classique (avec la 10ème, également recommandée) et aussi la plus ambitieuse sur le plan formel (des bribes de dodécaphonisme), à la fois limpide et mélodieuse, en 4 mouvements (2 mouvements vifs et courts, notés "allegretto", alternant avec 2 mouvements plus lents et plus longs, notés "adagio"), autour du thème de la mort, de la disparition, de la vie esseulée : le 1er est un magasin de jouets sans âme (avec une ouverture distancée à la flûte soliste, puis un orchestre tournoyant jusqu'au vertige, coupé par des roulements de tambour), le 2ème semble enfermé dans la solitude (au milieu, le solo de violon, la marche funèbre, sublime, contrastée par des bois métalliques), le 3ème est un bref quasi-scherzo qui se dilue (l'orchestre est réduit au minimum), le 4ème est très émotionnel (un adieu à la vie, avec un fin en queue de poisson) ; à noter les courtes citations au début de Rossini (ouverture de "Guillaume Tell", avec ironie) et vers la fin, de Wagner ("Die Walkyrie" et "Tristan und Isolde", pour le destin de la mort et la nostalgie de l'amour), et le développement en passacaille du thème de l'invasion de sa 7ème Symphonie, comme l'inexorabilité du temps qui détruit l'Homme ; Extrait-Vidéo [création : 8 Janvier 1972, à Moscou (Russie)]. | 43 | xxx | +++++ | . |
Connesson (Guillaume) | 1997 | Supernova (orchestre) [27 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre inspirée par une toile de Kandinsky intitulée «Quelques Cercles» (1926), dans laquelle une prolifération de ronds de couleurs se déploie sur un fond bleuté et uniforme de nature cosmique et par la lecture du livre «A Brief History of Time [Une brève Histoire du Temps]» (1988) de l'astrophysicien Britannique (paralysé) Stephen Hawking, une parabole de l'infiniment grand : la pièce, à l'écriture brillante et truffée de références entre Respighi et le premier Messiaen, entre Jolivet et Adams, est d'une grande énergie ludique et sans cesse renouvelée ; totalement tonale, mélodique, et montrant (déjà) une réel métier d'orchestrateur des grandes masses, la pièce conte le récit tragique et merveilleux de la mort d'une étoile par son explosion gigantesque qui génère une clarté (une supernova) égale à cent millions de soleils d'énergie ; la pièce est en 2 mouvements enchaînés et très contrastés, le 1er comme un crescendo de tension, une mise en ébullition progressive, jusqu'à l'énorme déflagration suivie de spasmes entrecoupés par un mystérieux choral de cuivres, le 2ème comme une danse allante (franulaire) où le rythme et les courts motifs incisifs dominent ; elle s'inscrit comme le dernier élément d'un triptyque avec 2 pièces (ultérieures), "Aleph" (2007, explosion initiale avec un tutti extrême, 9 minutes) et "Une Lueur dans l'Âge Sombre" (2005, lent et contemplatif, 20 minutes) ; Extrait-Vidéo [création : 17 Octobre 1997, à Montpellier (France)]. | 17 | xx | +++++ | . |
Connesson (Guillaume) | 2012 | Flammenschrift (orchestre) [42 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). La pièce, courte et virtuose, s'ouvre par une danse, semblant brutale, échevelée ; elle bout d'impatience (raisonnée... le compositeur ne se laisse jamais aller) ; il y a un épisode central qui paraît un peu plus mesuré, voire majestueux ; enfin, la pièce s'organise davantage, motrice, avec une gradation maitrisée vers le fortissimo final ; note : les citations de séquences Beethoveniennes sont plutôt cachées, mais ce qui transparaît plus, c'est bien l'opposition des pupitres, à la manière du maître de Bonn ; Extrait-Vidéo [création : 8 Novembre 2012, Paris (France), Théâtre des Champs-Élysées] | 9 | xxx | +++++ | N |
Copland (Aaron) | 1944 | Appalachian Springs (orchestre) [44 ans] | Orchestre (grand). Un poème symphonique (pour un ballet) en un seul mouvement, entièrement paisible, qui s'ouvre en douceur, puis devient dansant, prend l'air des grands espaces avec majesté, vit la nature au plus près ; c'est le dernier des 3 ballets sur des thèmes Américains (après "Billy the Kid" et "Rodeo") ; les personnages célèbrent le Printemps en Pennsylvanie, avec des rythmes de quadrilles, une suite de variations sur un hymne des Shakers "The Gift to be Simple", et des épisodes méditatifs et de prière, à la fois simples et intimes ; une œuvre entièrement tonale, qui hérite de Charles Ives (les cuivres, somptueux) et du néoclassicisme : à l'écoute attentive, la musique minimaliste n'est pas loin ; la pièce existe en 4 versions par le compositeur lui-même : le ballet et la suite de ballet, pour ensemble de 13 instruments et pour grand orchestre ; Extrait-Vidéo [création : 30 Octobre 1944, à Washington D.C. (USA)]. | 28 | xxxx | +++++ | . |
Copland (Aaron) | 1942 | Rodéo (orchestre) [42 ans] | Orchestre (petit, bois par 2, voire grand). Au menu cinémascope et technicolor ; c'est le second de la trilogie des ballets du compositeur, mais à la différence de "Billy the Kid" tragique, c'est une comédie (la mégère apprivoisée dans le style des cow-boys) ; la suite réunit plusieurs chansons folkloriques et des airs de quadrille, en 5 sections (1. Buckaroo Holiday, 2. Corral Nocturne, 3. Ranch House Party, 4. Saturday Night Waltz, 5. Hoe-Down) ; une pièce divertissante et joyeuse, surtout le final enjoué et animé "Hoe-Down", un tube ; le début est une fanfare traditionnelle, débridée (répétée) ; l'épisode suivant "Corral Nocturne" est plus profond, bien sûr nocturne et paisible ; ensuite, il y a un thème joué au piano de type Honky-Tonk, accompagné par la clarinette ; l'avant dernière partie est une valse élégiaque, nocturne également ; enfin, le Hoe-Down s'ouvre sur une chanson folklorique Bonaparte's Retreat qui est longuement développée, joyeuse, entrainante, voire humoristique (après des reprises du thème du rodéo), mais au lieu de mener à un paroxysme, la pièce se termine par une pirouette (un brin convetionnelle) ; une musique, très pro, à l'orchestration éprouvée (façon Lili Boulanger), inspirée, jouissive, à l'Américaine ; Extrait-Vidéo | 25 | xx | +++++ | N |
Crumb (George) | 1984 | A Haunted Landscape (orchestre) [55 ans] | Orchestre (bois par 3, avec piano amplifié et percussions variées dont une cuica, c'est-à-dire un tambour Brésilien à friction). Une sorte de poème symphonique lent et souple, habité et impersonnel, qui met au plus haut le mystère, l'énigme, le fantômatique (le titre signifie un paysage hanté), pour évoluer de plus en plus vers la poésie, la méditation, le rêve ; la pièce s'ouvre sur une mélodie scandée au piano (préparé), élargie en mélopée aux bois, soulignée par les cuivres, puis la tension (maîtrisée, contenue) augmente peu à peu avec les percussions, et ainsi de suite alternant alors emportements et sérénité, appels enfiévrés et statisme, et interjections courtes et évanescence, pour finir dans le néant ; au total un son tout métallique, une ambiance magnétique, incertaine, le mélange de percussions inhabituelles voire traitées de façon bizarre, de microtonalités et d'instruments amplifiés et-ou modifiés crée une écoute déconcertante, à la limite de l'instabilité, en tout cas immersive ; Extrait-Vidéo [création : 7 Juin 1984, New York (USA)] | 16 | xxx | ++++ | N |
Dalbavie (Marc-André) | 1985 | Miroirs transparents (grand orchestre) [24 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre qui marque une extension des timbres et qui montre que la démarche spectrale n'est pas incompatible avec le traitement habituel polyphonique de l'orchestre : une introduction lente, mystérieuse, par vagues, ensuite des ponctuations des cordes, stoppées par les cuivres, alternativement, suivies par des virevoltements en spirale de l'orchestre qui semblent ne jamais vouloir finir (et créent une sorte d'envoûtement), enfin un final un peu plus animé, cahotant ; le résultat est d'une grande beauté sonore, même si l'originalité semble manquer, avec le recul du temps ; hélas, aucun extrait vidéo à ce jour [création : Novembre 1985, au Festival de Metz (France)]. | 18 | xx | ++++ | . |
Denisov (Edison) | 1970 | Peinture (grand orchestre) [41 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). La pièce s'ouvre par une lente mélopée erratique des cordes (violons, violoncelles), éclairée par des glockenspiels de vibraphone, assombrie par les bois et vents graves et les percussions sourdes ; l'ensemble est presque contemplatif, aérien, qui avance très lentement, à la limite du poème symphonique avec un art consommé de l'orchestration ; la pièce est descriptive-évocatrice, d'après 3 tableaux (une nature morte, une situation tragique, un nu) du peintre Russe Boris Birger (par ses traits, ses points) avec ses couleurs sombres (mais rien à voir avec les "Tableaux d'une Exposition" de Modeste Moussorgski) ; plutôt des irisations chatoyantes, des introgressions lentes aux trompettes (avec wawa) et une polyphonie de textures éclairées au glockenspiel et au celesta ; un climax aus cordes aigues avant un roulement de percussions solennel ; la pièce se termine dans l'errance, le rêve, et des appels de cloche ; Extrait-Vidéo [création : 30 Octobre 1970, à Weiz près de Graz (Autriche)]... sur le même thème, "Signes en Blanc" pour piano solo (1974), "Trois Images d'après Paul Klee" pour sextuor divers (1985) | 12 | xxxx | ++++ | N |
Dillon (James) | 1987 | Helle Nacht (grand orchestre) [37 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre confondante, nocturne et rêveuse, à l'écriture statique, avec grondements souterrains, fourmillements, progression linéaire, timbres lumineux contrastés (bois colorés/percussions froides) ; une pièce qui oppose les clairs et les obscurs, comme une nuit traversée d'éclairs (le titre Allemand signifie Nuit claire), et au-delà le silence et l'abondance, le micoscopique et l'infini (avec l'autre symbolique du titre de Nuit étoilée) ; Extrait-Vidéo [création : 14 Septembre 1987, au Musica Nova Festival de Glasgow (Écosse)]... de la même veine, "Ignis Noster" (1992, spatialisée, pour orchestre, 22 mn). | 23 | xxxx | ++++ | . |
Dufourt (Hugues) | 1979 | Surgir (orchestre) [36 ans] | Orchestre (grand, bois par 4). La pièce est caractéristique des couleurs métalliques affectionnées par le compositeur ; dès le début, un allaige de cuivre, étrange, marque, par ponctuations, la progression lente, mais inexorable de la musique ; le titre implique un effet de surprise, c'est vrai, mais ici, la survenue des évènements est totalement maîtrisée ; l'ambiance est à la fois nocturne et froide ; ensuite, la pièce évolue par bruissements et inéluctablement par effondrements, s'accélère (un peu) et se déploie sans fin (jusqu'à simple dysjonction) ; Extrait-Vidéo [création : 13 février 1985, Paris (France)] | 25 | xx | ++++ | N |
Dutilleux (Henri) | 1965 | Métaboles (grand orchestre) [49 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre équivalente à un concerto pour grand orchestre (les bois et les cuivres par 4), privilégiant, et mettant en valeur successivement, les bois, les cordes, les percussions, les cuivres, et l'ensemble complet (et le matériau évolue aussi avec progressivité), avec une grande souplesse (fluidité) rythmique et mélodique, qui s'appuie sur une instrumentation raffinée ; 5 courtes parties sans intermède : la 1ère, "Incantatoire", adopte la forme du rondo et répète plusieurs fois (ostinatos au début, mais sans grande insistance) un bref motif ; la 2ème, "Linéaire", est plus polyphonique (division des cordes en 14 parties réelles, comme Bartók) dans une ambiance d'errance vague ; la 3ème, "Obsessionnel", est une passacaille rapide avec un motif obstiné (intégralement écrite en 12 sons) ; la 4ème, "Torpide", construite sur un accord unique, renonce à toute mélodie ; la 5ème, "Flamboyant", plus dynamique (tout en étant solidement tenue) et avec une coda éclatante (impact fracassant des dernières mesures), s'apparente à une cérémonie, avec sa part de mystère et de magie ; une œuvre d'une maîtrise et d'une concision exemplaires dont le titre de métaboles évoque justement l'idée de métamorphose (par la fusion et la transformation du matériau et des pupitres) ; Extrait-Vidéo [création publique : 14 Janvier 1965, à Cleveland (USA)]. | 16 | xxx | +++ | . |
Dutilleux (Henri) | 1978 | Timbres, Espace, Mouvement (grand orchestre) [62 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, un demi-cercle de 12 violoncelles, et 6 à 10 contrebasses, 3 percussions, 1 célesta, 1 harpe, mais pas de violons, ni altos). Une œuvre d'une belle poésie hypnotique (d'après la peinture de Vincent van Gogh, La Nuit étoilée) ; l'espace de l'orchestre paraît s'agrandir par le dialogue des pupitres étagés (violoncelles et bois-vents, bois-vents, célesta-reste) et la couleur du timbre est déplacé vers les graves par la prépondérance des violoncelles (sans aucune corde plus aiguë) placés devant, autour du chef ; le mouvement (serein) est symbolisé par la rythmique lentement tournoyante, semblable aux éclats jaunes des étoiles de Van Gogh, l'alternance de mouvements statiques et de flambées sonores (parfois fortissimo) ; la musique sonne comme du Berg (Alban) avec parfois des tessitures à la Moussorgsky, en jouant en plus sur les moirages de couleur (par exemple dans l'interlude entre les 2 parties, aux violoncelles seuls) ; il ne s'agit pas d'un poème symphonique décrivant un tableau (célèbre), mais plutôt d'une ambiance symphonique évoquant le tableau hypercoloré de Van Gogh montrant un village avec un grand clocher et de plus grands cyprès enveloppé d'un vaste ciel nocturne avec clair de croissant de lune, grosses étoiles et spirales de vent (à l'instar de la "Mer" de Debussy) ; la 1ère partie "Nébuleuse" débute dans le mystère de sourdes percussions et par une lente séquence nocturne de progression des bois et vents et s'installe dans la quiétude (parfois fragilisée, voire dramatisée, mais les accélérations sont toujours maîtrisées), l'interlude est une pause dans les graves comme un échappement tout en nuances (et variations chromatiques, notamment par l'hétérophonie des violoncelles et les effets de pizzicati), la 2ème "Constellation" revient au schéma initial, avec d'autres ambiances (et un beau solo au bois) ; Extrait-Vidéo [création : 10 Janvier 1978, à Washington D.C. (USA), avec une extension-interlude en 1991 qui porte la pièce de 15 à 21 minutes]. | 21 | xxx | +++ | . |
Eötvös (Peter) | 2000 | ZeroPoints (orchestre) [56 ans] | Orchestre (bois par 3). Une pièce brillamment complexe et virtuose, à l'orchestration colorée, en 8 courtes sections qui se déploient à partir d'un désordre organisé, tout en maintenant un jeu d'articulations clair et une mise en scène élaborée, de plus en plus théâtralisée ; au tout début, la flûte égraine des notes comme un décompte (pour partir de zéro), puis, après une intro fiévreuse et bouillonnante dans le quasi chaos sauvage (mais avec une mélodie et un ordonnancement induits), les vents engagent une phase étirée et énigmatique, suivie d'un collage de la 2ème « Notation » de Boulez, puis l'orchestre reprend son jeu Boulezien de désordre organisé (dans une ambiance ludique, virant vers le festif), alternant (percussif, strié) des épisodes enjoués et d'autres plus mélodramatiques (alors en se distanciant carrément de Boulez), puis revient une phase énigmatique, plus sombre (contrastée par des percussions à lames claires) jouant sur les frémissements, les dérapages vertigineux, les démarrages avortés dans un rythme de plus en plus festif ; et elle se termine, naturellement par un pied-de-nez de quelques notes égrainées au xylophone, du brillant à l'éteint ; curieusement, la pièce joue sur le statisme de la plupart des épisodes musicaux et sur le dynamisme de son déroulé, tout en étant marquée d'un certain optimisme, sans doute en ligne avec l'euphorie symbolique du passage à l'an 2000 ; Extrait-Vidéo [création : 27 Février 2000, à Londres (Grande Bretagne), par l'Orchestre symphonique de Londres, (reprise le 6 Mars 2000 au Théâtre des Champs-Elysées, à Paris) dirigé par Pierre Boulez, pour honorer son 75ème anniversaire] | 14 | xxx | ++++ | N |
Ginastera (Alberto) | 1943 | Estancia (orchestre) [27 ans] | Orchestre (grand). Suite de Ballet (la musique de la chorégraphie dure un peu moins de 30 minutes). Ouverture (1er mouvement, intitulé "Les Travailleurs agricoles"), dynamique, motorique avec ostinatos et montée en puissance, puis une danse lyrique et mélancolique (douce, sensible, romanesque, 2ème mouvement, intitulé "Danse du Blé"), puis une épopée sauvage (l'hacienda, 3ème mouvement "Les Eleveurs") avec un rodéo, et enfin le 4ème mouvement, fameux "Malambo" final qui commence en tournoyant, se développe en transes fébriles, en devenant de plus en plus échevelées (avec un fort piment folklorique, avec du nerf, de l'énergie physique à l'état pur) ; le ballet lui-même dépeint en termes héroïques et nostalgiques la vie dure des Gauchos nomades dans les plaines sauvages d'Argentine, avec une romance entre un garçon de la ville et une fille de ranch ; Extrait-Vidéo ; de la même veine, "Panambi" (1940), une musique encore plus immédiate, sachant que symboliquement "Estancia" commence par "El Amanecer", traduit par aube, le titre de la danse finale du ballet précédent [création : 12 Mai 1943, à Buenos Aires (Argentine), dirigée par Ferruccio Calusio] | 11 | xxx | +++++ | . |
Grisey (Gérard) | 1974 | Dérives (grand orchestre) [28 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, dont 1 groupe distinct avec 1 saxophone contrebasse (aussi saxophone ténor), 4 percussionnistes, 1 guitare électrique, 1 piano (aussi célesta), 4 contrebasse à 5 cordes, tous solistes). La pièce est emblématique des débuts de la mouvance spectrale (le son ayant une attaque, une trajectoire, une enveloppe, comme une colonne de fumée, alors avec un aspect diffus, vite mis de côté) et de l'engagement qui en résulte pour percer (dans une harmonie post-tonale) face au courant post-sériel en cours de désagrégation par sur-complexité ; elle cherche à créer de lentes mais inflexibles transformations de matière sonore, où l'objet de la composition devient le changement entre un instant et le suivant (par des processus dits spectraux, ici larges) ; elle montre une inhabituelle grande fluidité, une poésie miroitante et une ouverture vers l'infini qui aboutit à une forme de rupture ; note : à ne pas confondre avec la pièce de même titre de Pierre Boulez, 10 ans plus tard ; hélas, aucun extrait vidéo à ce jour [création : 31 Octobre 1974, Paris, salle Wagram, par l'Orchestre national de France, direction Reinhard Peters] | 28 | xxx | ++++ | N |
Grisey (Gérard) | 1981 | Transitoires (grand orchestre) [35 ans] | Orchestre (bois par 4). La pièce d'un seul tenant commence par un court appel suivi de sa détente étirée (assez tendance à l'époque) ; le temps semble s'arrêter ; le filtre est retiré, le temps est dilaté, les spectres éclatent jusqu'à la 55ème harmonique, de véritables polyphonies spectrales se répartissent tout l'espace sonore ; comme dans "Prologue", la tension se courbe, le rythme tournoie (par les percussions en peau), la progression est à la fois mobile et immobile (les tropettes scandent la progression) ; la pièce finit avec plus d'ampleur, presque impérieuse, en un va et vient fascinant(aux bois), en ralentissant (aux cordes, puis alto seul en soliloque) ; l'objet sonore n'est qu'un processus contracté, le processus n'est qu'un objet sonore dilaté ; l'oreille voyage dans une galaxie, comme un élargissement de la conscience (ou en tout cas de sa perception) ; de la même démarche compositionnelle, les 5 autres pièces des "Espaces Acoustiques" (un monument de la musique contemporaine), "Transitoires" étant la cinquième du cycle en concert, cf. Extrait-Vidéo II [création : 5 Octobre 1981, Biennale de Venise (Italie)]. | 21 | xxx | ++++ | N |
Haas (Georg Friedrich) | 2003 | Natures Mortes (orchestre) [50 ans] | Orchestre (grand, bois par 3, avec accordéon soliste). Une pièce différente du compositeur dans sa conception car plus affirmative, pariant davantage sur des timbres individualisés ; elle est divisée en 3 sections continues dans chacune desquelles des séquences élémentaires sont répétées par vagues ; d'abord une introduction quasi-mélodique, homophonique, une sorte de fanfare qui se répète sans but (contrastant les trompettes brillantes ou les percussions battantes et le reste de l'orchestre dans les profondeurs) ; elle est suivie d'un processus quasiment compulsif et typiquement répétitif (au sens du minimalisme Américain, mais avec des microtonalités jusqu'au seizième de ton) qui motorise et mécanise la perception, avec des flux et des reflux, des accélérations et des ralentissements (essoufflements) temporaires ; enfin, la 3ème section, plus planante et scintillante, utilise de longues cordes harmoniques soutenues, matérialisées en volutes (ou en bouffées) qui se propagent sans jamais pouvoir aboutir (comme une vis sans fin), puis peu à peu le processus répétitif s'amenuise jusqu'à se diluer dans l'immensité (en pianissimo) ; Extrait-Vidéo [création : 19 Octobre 2003, Donaueschingen (Allemagne)] | 26 | xx | +++++ | . |
Henze (Hans Werner) | 1984 | Symphonie n°7 (grand orchestre) [58 ans] | Orchestre (grand). Une symphonie classique (4 mouvements bien codifiés), au sens du langage, de la construction, de la forme («sonate»), avec une approche libre de la tonalité et de tradition Allemande ; le 1er mouvement commence par une danse suivie d'un enchaînement de catastrophes, le 2ème est une ode funéraire en hommage à Bartók (du Lac des Pleurs de Barbe-Bleue), le 3ème, rapide et sombre, rejoint Mahler, le 4ème est une mise en scène orchestrale d'un poème d'Hölderlin ; remarquablement équilibrée et inventive, la pièce vaut par son final hallucinant qui n'en finit pas jusqu'à l'orgiaque ; Extrait-Vidéo [création : 1er Décembre 1984, à Berlin (Allemagne)]. | 45 | xxxx | +++++ | . |
Huber (Klaus) | 1968 | Tenebrae (orchestre) [44 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre emblématique du style de Klaus Huber (sans structure apparente), d'une exigeante séduction, avec un long collage d'après le choral «Christ ist erstanden» de Bach (parfois méconnaissable, tant le tissu confié aux cordes puis aux vents, en pianissimo, est serré) et ouverte (l'ordre des fragments, le choix du rythme et du tempo sont délégués à l'interprète) ; la texture dense obtenue évoque les effets micro-polyphoniques de Ligeti, et rend la partition encore plus mystique et expressive (sombre, notamment par la couleur des appels en tutti) ; Extrait-Vidéo [création : 24 Septembre 1968, à Varsovie (Pologne)]. | 18 | xxx | ++ | . |
Khatchatourian (Aram) | 1942 | Gayaneh (orchestre) [39 ans] | Orchestre (grand). Un ballet en 4 actes et 5 tableaux d'une durée qui dure jusqu'à 3 heures (au titre parfois écrit "Gayane" ou "Gayne") sur un livret de Konstantin Derjavine ; il s'agit d'une histoire simple (édifiante) qui se déroule dans une ferme collective, qui reflète les attitudes et les sentiments des années 1940, lorsque le pays est impliqué dans la guerre mondiale, et qui est une célébration de l'amitié des peuples et des nations de l'Union Soviétique : Gayaneh, fille d'Avanes, le responsable, participe à la capture d'un étranger qui a pénétré clandestinement en Union Soviétique pour y découvrir des secrets géologiques ; dans un premier temps, les personnages, faibles, ne peuvent pas résister à l'influence de l'espion, mais, bien sûr ensuite, ils surmontent ensemble les problèmes, remportent la victoire finale et créent triomphalement leur propre collectivité pour y vivre ensuite dans le bonheur et la fraternité ; le compositeur l'a remanié souvent (en 3 actes et 7 scènes en 1957, pour une autre chorégraphie au Bolchoï) et en a tiré au moins 3 suites symphoniques qui contiennent le bref tube (moins de 3 minutes), la célèbre "Danse du Sabre" (souvent joué isolément, ce qui occulte le reste de la partition) : un ostinato féroce (adapté et arrangé à toutes les sauces), une danse tourbillonnante et enfiévrée, chromatique en notes répétées staccato, avec glissandos aux cuivres et un 2ème thème très lyrique aux cordes, qui a beaucoup fait pour la notoriété de la pièce par son orchestration rutilante, son dynamisme au premier degré, son impact folklorisant (rythmes et textures) ; les 3 suites ont respectivement 8, 7 et 6 mouvements (n°1 : 1- introduction, 2- danse des jeunes filles, 3- réveil et danse de Aïcha, 4- danse des montagnards, 5- berceuse, 6- scène de Gayaneh avec Ghiko, 7- adagio de Gayaneh, 8- Lesghinka ; n°2 : 1- danse de bienvenue, 2- danse lyrique, 3- danse Russe, 4- variation de Nouneh, 5- danse du vieillard et des tapissières, 6- variation d'Armène, 7- incendie ; n°3 : 1- cueillette du coton, 2- danse des jeunes Kurdes, 3- introduction et danse des vieillards, 4- tissage des tapis, 5- danse du sabre, 6- Hopak), et tous sont caractérisés par le romantisme immédiat, l'émotion appuyée, le lyrisme exacerbé ; l'adagio de Gayaneh a aussi été repris-cité par Stanley Kubrick dans son fameux film «2001 : Odyssée de l'Espace» ; Extrait-Vidéo [création (radiodiffusée) : 3 Décembre 1942, dans une chorégraphie du Kirov, sur la petite scène du théâtre d'État de Perm, appelée alors Molotov, à 1450 km à l'Est de Moscou (Russie)] | 57 | xxx | +++++ | . |
Khatchatourian (Aram) | 1956 | Spartacus (orchestre) [53 ans] | Orchestre (grand). Un ballet épique en 3 actes d'une durée jusqu'à 3.5 heures sur un livret de Nikolai Volkov d'après des évènements historiques de l'antiquité (et suite à une visite officielle du compositeur en Italie en 1950, notamment du Colysée de Rome) ; il s'agit d'une histoire martiale (édifiante) : Spartacus, un Thrace roi et esclave, d'abord en rebellion à la tête de 70 gladiateurs en 73 avant notre ère, se retrouve l'un des chefs de 120 000 esclaves, paysants et marginaux en révolte contre l'oppresseur impérial Romain (connue comme la 3ème Guerre Servile) qui d'abord dominent les légions Romaines, puis sont défaites par le général Crassus (le livret hyper-romantique s'écarte de la réalité historique en ajoutant 2 romances, comme un peplum Hollywoodien, entre Spartacus et Phrygia, idéalisée, et entre Crassus et Aegina, dépravée, et une dimansion christique) ; au 2ème degré, c'est une fable contre l'asservissement des peuples et un emblème-symbole contre l'oppression (les communistes d'Allemagne choisissant même le nom de «spartakistes» en 1918) ; la pièce est une fresque monumentale, une épopée aux dimensions cinématographiques, avec opulence mélodique et exotisme luxuriant des harmonies, orchestration brillante, rayonnement lyrique (à la suite de Tchaikovsky, du Stravinsky de "L'Oiseau de Feu", et du Rimsky-Korsakov de "Shéhérazade"), et avec des scènes de fête ou de lutte mémorables ; le compositeur l'a remanié au moins 2 fois (en 1958, dans un style pantonimique et avec l'ajout de chœurs, et en 1968, pour une durée resserrée d'environ 2 heures) et en a tiré au moins 4 suites d'orchestre respectivement en 6, 4, 5, et 4 mouvements (n°1, 1- introduction et danse des nymphes, 2- introduction, danse d'Égine et de Harmodius, 3- variation d'Égine et bacchanale, 4- scène et danse avec les crotales, 5- danse des filles de Gadès, 6- victoire de Spartacus ; n°2, 1- adagio de Spartacus et Phrygia, 2- entrée des marchands, danse d'une courtisane romaine et danse générale, 3- entrée de Spartacus, querelle, et la perfidie d'Harmodius, 4- danse des pirates ; n°3, 1- le marché, 2- danse d'une esclave Grecque, 3- danse d'une jeune Égyptienne, 4- danse de Phrygia et scène d'adieu, 5- danse du sabre par les jeunes Thraces ; n°4, n°1, 1- danse mélancholique de Bacchante, 2- la procession, 3- mort du gladiateur, 4- appel aux armes et soulèvement) ; la Suite n°2 contient un tube bref (9 minutes), le célèbre "Adagio de Spartacus et de Phrygia" (souvent joué isolément, ce qui occulte le reste de la partition) ; l'adagio de Spartacus a aussi été repris-cité par Tinto Brass dans son film «Caligula» (1979) ; Extrait-Vidéo [création : 27 Décembre 1956, au théâtre Kirov de Saint-Pétersbourg, alors Léningrad (Russie, alors, URSS)] | 78 | xx | +++++ | . |
Kurtag (György) | 1994 | Stèle (grand orchestre) [68 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre extraordinaire par son côté descriptif et son orchestration très expressive : un poème funèbre qui commence par de lents et fluctuants glissandi (littéralement pleurs), suivi de plaintes, lamentations, et enfin semble se diluer dans l'au-delà (par des répétitions évoquant un convoi) ; une musique unique d'hommage (y compris avec des chorals en brefs collages) qui littéralement enveloppe de douleur profonde, de frissons, avec une palette de tons étonnante (à la fois lourds et colorés) ; Extrait-Vidéo [création : 14 Décembre 1994, à Berlin (Allemagne), par les Berliner Philharmoniker]. | 13 | xxxx | +++++ | . |
Ligeti (György) | 1961 | Atmosphères (grand orchestre) [38 ans] | Orchestre (grand, de 89 musiciens et autant de parties réelles). Une œuvre de fusion qui débute, paisible, par un long accord tenu (un cluster couvrant 5 octaves) qui se transforme lentement (un canon à 56 voix aux cordes) pour évoluer vers un fourmillement continu, mystérieux (il est bien difficile de ne pas voir défiler, en même temps, les images psychédéliques et colorées de «2001, Odyssée de l'Espace...» de Stanley Kubrik en 1968, même si cette extraordinaire musique se suffit à elle-même), pour se terminer par des appels assourdis, puis par des murmures qui s'éteignent ; l'impression prégnante qui ressort de son édition est celle d'une toile (d'araignée) qui n'en finit pas de se propager sans bord (aucun motif net, aucune structure rythmique n'est audible de façon patente, il s'agit plus d'une transformation continue de timbres et de niveaux sonores) ; historiquement, sa forme statique opposée au matériau sonore en mouvement constitue une rupture d'avec le sérialisme, marqué par la discontinuité, et son utilisation des clusters harmoniques fait suite à Xenakis ou au Penderecki ("Anaklasis"), mais avec ici avec une animation dynamique de l'intérieur... une grande réussite démonstrative ; Extrait-Vidéo [création: 22 Octobre 1961, à Vienne (Autriche)]... de la même veine, "Ramifications" (1969, pour ensemble à cordes, plus fluctuante et irisée). | 9 | xxxx | +++ | . |
Ligeti (György) | 1967 | Lontano (grand orchestre) [44 ans] | Orchestre (grand). Un très long accord fluctuant (vents, puis cordes) ouvre cette œuvre qui devient scintillante, en restant très fondue, et qui avance lentement, avec de longs crescendos et dé-crescendos, comme dans un rêve méditatif ; dans la partie médiane, l'orchestre s'étire comme dans une supplique, de plus en plus fort et aigu, jusqu'à l'apogée, suivi à nouveau du rêve méditatif ; c'est la pleine période de micropolyphonie du compositeur, avec de nombreux canons à l'unisson et doublements d'octaves qui produisent à l'oreille un son novateur, globalement mouvante ; Extrait-Vidéo [création : 22 Octobre 1967, à Donaueschingen (Allemagne)]. | 12 | xxxx | +++ | . |
Lindberg (Magnus) | 1994 | Aura (orchestre) [36 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). Une pièce fascinante à l'orchestration chatoyante (très maîtrisée), au matériau tout en masses harmoniques qui évoluent, se modellent, se transforment sans cesse, dans une profusion de couleurs, de rythmes, d'humeurs changeantes, qui est dédiée au compositeur Polonais Witold Lutoslawski (dont la mort a été annoncée au moment de sa composition), mais davantage marquée par un tribut à Pierre Boulez ("Les Notations") ; elle est construite en 4 mouvements qui sont joués sans interruption et peu différentiés (de durées, en gros, égales à 2 fois un tiers de temps, puis 2 fois un sixième de temps) ; le 1er débute par un son contnu d'extrême grave enchaîné par de multiples séquences agitées, dispersées, dans une ambiance énigmatique, mystérieuse, mais toujours allante ; puis, avec des séries d'appels de trompettes et autres cuivres et une ambiance plus distancée, moins agitée (plutôt frémissante) se développe la 2ème section (une vision différente de la même matière harmonique), toujours allante ; la 3ème change d'humeurs (plus heurtées, faites d'accélérations et de coups de freins, de blocages) et apparaît plus impérieuse, plus industrieuse (comme avec l'émergence de machines), toujours allante mais avec quelques ostinatos marquant le stress et le mouvement sans fin (et sans issue) ; le 4ème est plus kaléidoscopique avec reprise et synthèse des humeurs précédentes (dont la dernière devenant alors carrément furieuse et incontôlée), toujours allant, mais plus directionnel (moins imprévisible) pour, soudain, dans les toutes dernières notes, basculer vers l'apaisement [création : 11 Juin 1994, Tokyo (Japon)] | 39 | xxx | ++++ | . |
Maderna (Bruno) | 1972 | Aura (orchestre) [52 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, 4 flûtes ou flûtes piccolo, 3 hautbois, 1 cor anglais, 1 clarinette en mi bémol, 2 clarinettes, 1 clarinette basse, contrebasson, 3 bassons), 4 cors, 5 trompettes, 4 trombones, 1 vibraphone, 2 xylophones, 2 marimbas, 1 percussionniste avec timbales, 2 harpes, célesta, cordes en 6 groupes). La pièce, en 1 seul mouvement, commence dans un mélisme rêveur ; puis elle s'interroge, globalement avec douceur, dans un tapis de notes scintillantes avec force dissonances, entrecoupées d'appels hésitants aux trompettes ou d'un solo élégiaque de clarinette ou de percussions chaloupées ou d'égrènement de harpes ; enfin elle semble errer san but, avant de s'éteindre complètement ; un modèle d'orchestration souple post-sérielle Extrait-Vidéo [création : le 24 Mars 1972, à Chicago (USA), direction : Bruno Maderna]. | 17 | xxx | +++ | . |
Manoury (Philippe) | 1999 | Sound and Fury (grand orchestre) [47 ans] | Orchestre-grand (109 musiciens, avec 5 percussions et bois et vents par 4, souvent doublés en raison de la spatialisation stéréophonique comme par exemple 8 cors, 6 trompettes, 6 trombones). Le titre de la pièce (en référence au roman de William Faulkner, «The sound and the fury», lui-même emprunté au Macbeth de Shakespeare) signifie bruit et fureur, mais c'est d'abord le bruit, ensuite la fureur ; la pièce est d'allure Boulézienne (dès les premières mesures) et ce n'est pas surprenant car elle est dédiée à Pierre Boulez pour son 75ème anniversaire ; après une introduction allusive qui semble parcourir son programme (faussement organisé), elle s'engage plus avant dans le bruit, insidieux, léger, suspendu, avec peu à peu des mécanismes de répétition ; dans un 2ème temps, progressivement, le bruit devient fureur (davantage de forte, des insistances, des velleités impérieuses, des ruptures marquées, un rythme éventiellement accéléré) ; enfin, la pièce transite par un long climax (brillant) avant de se rasséréner et finir dans un clin d'œil ; la sonorité et la couleur sont somptueuses et le savoir-faire orchestral patent ; la pièce joue aussi sur l'alternance d'une note unique en ostinato et de fracas-cassures-brisures frénétiques qui anéantissent tous les obstacles, toutes les difficultés (il ne s'agit pas d'un chaos, car sous le désordre naissent le charme vénéneux, la transe en staccato) ; au concert, la spatialisation symétrique (souvent en opposition) est saisissante avec 2 groupes identiques à droite et à gauche comprenant les cuivres et les cordes (les bois sont au milieu et les percussions à l'arrière) avec un seul d'orchestre ; Extrait-Vidéo [création : 3 Décembre 1999, Chicago (USA), par l'orchestre symphonique de Chicago, direction : Pierre Boulez (USA)]. | 29 | xxx | +++ | N |
Messiaen (Olivier) | 1946 | Turangalîlâ Symphonie (grand orchestre) [38 ans] | Orchestre (grand). La première symphonie moderne, un monument (en 10 mouvements pour piano, ondes Martenot, solistes, avec 4 thèmes récurrents), parfois grandiloquent ou surchargé, coloré, d'une inventivité exceptionnelle, avec des couleurs orchestrales innovantes pour l'époque. Incontournable, même si la première audition est toujours mitigée en raison de son caractère kaléidoscopique, sans logique interne, comme une gigantesque coulée de lave avec des poussées telluriques ; Extrait-Vidéo [création : 2 Décembre 1949, à Boston (USA), par Léonard Bernstein, version légèrement révisée : 1990]. | 80 | xxxxx | ++++ | . |
Messiaen (Olivier) | 1960 | Chronochromie (orchestre) [52 ans] | Orchestre (grand). La première œuvre de Messiaen dans sa recherche de la couleur orchestrale et, un temps, le porte drapeau de la Musique Spectrale : par rapport aux pièces de la période précédente, quasi-abandon des harmonies modales et apparition de rythmes plus saccadés (la filiation Boulez-Messiaen, soit en sens réciproque, est ici patente). La création par Hans Rosbaud à Donaueschingen a suscité un scandale mémorable : dans cette œuvre, et dès son titre, Messiaen associe les éléments temporel et sonore, suivant un principe de séries et de permutations et y commence un processus de «décomposition du temps» dont la structure, en «strophes» et «antistrophes», reprend le modèle des tragédies Grecques ; une partition brillante en 7 courtes parties, avec pas moins 18 mélodies enchevêtrées ; Extrait-Vidéo [création : 16 Octobre 1960, à Donaueschingen (Allemagne)]. | 24 | xxxx | ++ | . |
Murail (Tristan) | 1980 | Gondwana (orchestre de 78 musiciens) [33 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre caractéristique de son style de maturité, qui donne le sentiment de la continuité totale et libère des sons inouïs d'une grande richesse harmonique (microtonale), où la couleur domine sans contraste marqué (le gigantesque et monumental paléo-continent de Gondwana, au temps quasi arrêté) mais avec des déferlantes internes, des explosions sonores cacophoniques brèves (reflets de l'intense activité sismique et volcanique de Gondwana) ; la pièce se termine par une explosion cataclysmique mémorable ; Extrait-Vidéo [création : 21 Juillet 1980, à Darmstadt (Allemagne)]... de la même veine, plus contrasté, mais moins inspiré (influence Ircam) : "Time and Again". | 17 | xxxx | +++ | . |
Nunes (Emmanuel) | 1991 | Quodlibet (solistes et orchestre) [50 ans] | Orchestre (grand avec solistes). Une œuvre spatialisée qui est une sorte de ballet avec solistes, d'une précision métronomique (le chronomètre est un accessoire indispensable à l'exécution) ; le dispositif encerclant le public est établi en fonction des 79 musiciens, avec 2 chefs, répartis en 4 groupes : immobiles (l'orchestre avec 45 instrumentistes), immobiles (7 solistes), semi-mobiles (6 percussionnistes pour 10 postes d'exécutions répartis), mobiles (un ensemble de 21 instrumentistes) ; c'est surtout une pièce innovante et unique, car la première du genre en tant qu'auto-biographie musicale ou kaléidoscope de matériaux antérieurs du compositeur lui-même, sans être des citations ou des collages (les traits individuels de "Degrés", un intervalle de "Fermata", le madrigal de "Voyage du corps", la harpe de "Impromptu pour un Voyage II", un enchaînement harmonique de "Purlieu") ; d'après le titre (littéralement «ce que l'on veut», du Latin quod libet), le quodlibet désigne usuellement une forme musicale où sont intégrés avec liberté des matériaux hétéroclites, et ici le melting pot résultant est superbe, notamment au concert, l'auditeur étant quasiment promené dans l'espace, le temps, et l'onirisme ; la musique est, elle, singulière, toujours en mouvement, certes cérébrale, mais sensuelle, comme remise plusieurs fois sur le métier (mais pas répétitive) avec des angles, des focus, des espacements différents (parfois dissimulés), ne livrant pas immédiatement sa cartographie ou sa théâtralité (un peu comme la «Carte et le Territoire», de Michel Houellebecq) ; Extrait-Vidéo [création : 11 Juin 1991, au Coliseu de Lisbonne (Portugal)] | 56 | xxx | ++ | . |
Pablo (Luis de) | 1965 | Modulos I-II (orchestre) [35 ans] | Orchestre (petit). Une œuvre de pure facture instrumentale, avec progression détente, qui curieusement juxtapose parfois (verticalement) le modernisme sériel expressif et la mélodie (par séquences discontinues) ; la construction est typiquement savante, faussement désordonnée, en une succession de matériaux apparemment indépendants, mais qui en fait s'emboîtent par complémentarité : difficile, mais du grand art aux harmonies confuses et rythmes instables ; la première pièce est pour petit ensemble (11 instruments), la seconde pour deux ensembles avec 2 chefs ; hélas, aucun extrait vidéo à ce jour [création : I, 31 Juillet 1965, Festival de Darmstadt ; II, 24 Octobre 1967, à Madrid (Espagne)]... de la même veine (non écoutés en concert), "Modulos III" (1967) pour 17 musiciens en 3 groupes. | 21 | xxx | +++ | . |
Pécou (Thierry) | 2007 | Vague de Pierre (grand orchestre) [42 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, dont 6 cors, 4 trompettes et 6 percussionnistes). La pièce est en 4 mouvements comme une symphonie traditionnelle (il s'agirait davantage d'un poème symphonique étant donné le contexte à la fois descriptif et théâtral, pseudo-Chinois) ; c'est une coulée sonore extrêmement dense et puissante, d'une grande diversité d'expression primitiviste, paroxystique ; le 1er mouvement s'ouvre par une série de clusters de l'orchestre (tutti impératifs) et au mileu de contrastes de registres, elle atteint un sommet avec un climax orgiaque et apocalyptique ; dans le 2ème mouvement, lent, les sonorités sont plus fondues et plus sensuelles et l'atmosphère paisible ; le 3ème mouvement, d'abord quasi-fugé, ensuite éruptif, est vécu comme une sorte de scherzo progressif, animé mais pas exalté, jubilatoire, avec des secousses incontrôlées et des spirales sans fin, avant de terminer dans l'extase jouissive (en mode majeur) ; le 4ème mouvement surprend, car il est lent et suspendu (comme certaines symphonies de Gustav Mahler) et inouï et plus orientalisant sur le plan sonore, et la fluidité domine depuis le scintillement des percussions et la méditation des 4 flûtes jusqu'à une péroraison apaisée, à peine troublée par les roulements lointains des timbales, grands tambours ou grosses caisses et quelque appels dans l'hyper-grave ; au total, c'est une pièce au souffle épique, d'une belle réussite, à l'orchestration suprême, complexe et raffinée ; Extrait-Vidéo (à suivre) [création : 17 Février 2007, Paris, Maison de la Radio, festival Présences (France)] | 32 | xxxx | ++++ | . |
Penderecki (Krzysztof) | 1966 | De Natura Sonoris I (grand orchestre) [33 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). La pièce, courte, est magnétique, avec une intro saccadée, puis une sorte de marche lente, solennelle, avec des clusters prenants ; la 2ème section s'élève peu à peu, lentement, comme une reprise ; elle est plus calme, presque ostentatoire, avec des fourmillements, puis un chaos organisé (et qui laisse une forte impression, à la création), pour prendre un rythme plus allant avec une fanfare (typique du compositeur), à nouveau des fourmillements, des ondulations, jusqu'à une fin alternant climax terrifiant et suspension ; Extrait-Vidéo [création : 7 Avril 1966, au Festival de Royan (France)]... de la même veine, "Kosmogonia", pour 3 voix solistes, chœur mixte et orchestre (1970) | 7 | xxx | ++ | . |
Poppe (Enno) | 2008 | Altbau (orchestre) [39 ans] | Orchestre (bois par 3) ; le titre de la pièce fait allusion au passé et à ses manières de constructions, par nostalgie (solidité) ou par ironie (désuétude), on ne sait ; toujours est-il que, assez courte (un double mouvement symphonique), elle s'ouvre par des appels à dominantes de cuivre assez goguenards ; elle avance fermement mais avec des hésitations, des fluctuations ; il y a pas mal de tournoiements qui s'accélèrent, sans direction déterminée, sans intention manifeste ; peu à peu, la pièce prend de la substance et du corps, avec une belle montée en puissance lente, emportée par un mouvement et une animation patents et par des ostinatos (assez peu colorés) ; à mi-parcours, un 2ème mouvement débute de façon élégiaque, étirée, fluctuante (avec des motifs semblables aux précédents), mais plus lents et aux bois dominants, parsemés de quelques reliefs aux percussions et aux cordes) ; le flux reste solide, même si elle semble parfois se perdre ou s'abandonner ; les vents reviennent en s'ajoutant et la pièce semble s'éteindre tout en continuant à tournoyer de plus en plus sur place ; Extrait-Vidéo [création : 17 Octobre 2008, à Donaueschingen (Allemagne)] | 16 | xxx | ++++ | N |
Saariaho (Kaija) | 1990 | Du Cristal à la Fumée (grand orchestre) [38 ans] | Orchestre (grand, bois par 4, avec flûte traversière alto et violoncelle amplifiés). Un diptyque d'égale durée (créé en 2 temps) et dont les 2 volets peuvent être joués indépendamment ; les titres, contrastés (ordre vs. chaos), sont explicites quant au contenu musical : le cristal est un exemple classique de l'ordre répétitif, de la symétrie, de la masse compacte, permanente et la fumée, au contraire, est un état en constante métamorphose, imprévisible, évolutif, avec un pont entre les deux volets matérialisé par un solo de violoncelle à la fin du premier et au début du second (en miroir déformant) ; une musique lente, stable, à la progression prévisible, belle par ses timbres et ses couleurs uniques, à la texture variée qui, ici et là, atteint le monumental, et aux spectres et aux développements rythmiques dosés ; Extrait-Vidéo [créations : 5 Septembre 1990, à Los Angeles (USA) et 20 Mars 1991, aussi à Los Angeles]. | 36 | xxx | ++++ | . |
Scelsi (Giacinto) | 1961 | Aiôn (grand orchestre) [56 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre somptueuse en 4 mouvements (4 épisodes dans une journée de la vie de Brahma, laquelle journée dure 90 000 journées humaines !) qui commence dans une atmosphère mystérieuse (réverbérante) dans les sons graves (les vents, pas de violons, seulement un alto), se termine, après un climax éclair de percussions métalliques, à nouveau dans le calme ; le second mouvement déroule tension rythmique (martèlement caractéristique) et mélodie de violoncelles et d'instruments à vents, pour lui aussi se terminer dans le calme ; le troisième mouvement est caractéristique des micro-intervalles serrés de Scelsi, en quarts de tons entre Mi et Mi bémol, jusqu'à un finale violent et brutal ; le dernier mouvement évoque une lente progression (avec polarisation sur une note) pour se terminer mystérieusement par un balbutiement sombre des percussions ; Extrait-Vidéo [création publique: 12 Octobre 1985, à Cologne (Allemagne)]. | 20 | xxxx | +++ | . |
Schoeller (Philippe) | 2001 | Cinq Totems (grand orchestre) [44 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre en 5 parties titrées (courtes, des sortes de miniatures) : avec les faussement statiques "Saharien", "Stellaire" et "Glaciers" et les déchaînements de "Cyclone" et "Météorique", la démarche cosmique illustre ces études de timbres, d'une grande originalité ; une pièce immédiate, à la vitalité, au rythme et à la lumière si spécifique du style du compositeur, marqué par la résonance (à noter, une extension ultérieure, indépendante, avec chœur) ; hélas, aucun extrait vidéo à ce jour [création: 2 Février 2001, Festival Présences, à Paris (France)]. | 14 | xxxx | ++++ | . |
Stockhausen (Karlheinz) | 1958 | Gruppen (3 orchestres) [30 ans] | Orchestre (grand, divisé et spatialisé). Les 3 ensembles orchestraux (qui, par leur séparation, permettent l'étagement des tempi) sont disposés en fer à cheval, leur organisation étant homogène pour permettre de faire passer les sons d'un orchestre à l'autre (effet stéréo) ; c'est le sentiment de tourbillons (vifs, mais aussi calmes) et un sentiment d'immersion jubilatoire (notamment dans l'épisode central qui est une fausse cacophonie) qui dominent à l'audition ; le génie de cette œuvre tient dans une toute nouvelle prise en compte du temps et de l'espace en musique, et pour les chefs d'orchestre c'est une gageure, car les 3 chefs doivent s'écouter pour être tantôt synchrones et le plus souvent décalés (mais pas au hasard, selon une alchimie calculée par le compositeur) ; à noter : l'apogée de la pièce s'exprime par le même accord répété par les cuivres des 3 groupes orchestraux ; Extrait-Vidéo [création : 24 Mars 1958, à Cologne (Allemagne)]… de la même veine, "Zeitmasse" (1956), pour 5 musiciens, ébauche cette notion de spatialisation, dans le cadre de l'œuvre ouverte. | 24 | xxxxx | ++ | . |
Stroppa (Marco) | 2007 | Ritratti senza Volto (orchestre) [48 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). La pièce est en 3 tableaux intitulés "La Gravità", "L'Isolamento", "L'Apesanteur", comme des Portraits sans visage (traduit de l'Italien) ; elle experimente avec bonheur des palettes sonores nouvelles (sans informatique, juste par la combinanison des pupitres) et s'apparente aux enluminures tant elles sont méticuleusement ouvragées ; hélas, aucun extrait vidéo à ce jour [création : 10 Mai 2007, salle Pleyel, Paris (France), révisé en 2011]. | 16 | xxx | +++ | . |
Takemitsu (Toru) | 1977 | A Flock descends into the pentagonal Garden (orchestre) [47 ans] | Orchestre (grand, bois par 3). Le titre de la pièce en Japonais (Tori wa hoshigata no niwa ni oriru) [Un vol descend sur le jardin pentagonal] exprime à la fois le mouvement et le statisme et c'est très bien rencu d'un seul tenant, avec un déroulé linéaire fait de volutes (bien sûr qui descendent) et l'effet est saisissant ; par succession de séquences colorées (effet de fusion) et de séquences plus forté, moins nombreuses (en étant contenues), la pièce avance lentement, mystérieusement, dans un fondu inhabituel de couleurs avec d'infimes nuances ; les violons gémissent mais restent calmes, la flûte lance une mélopée, les percussions sont perlées ; le temps semble arrêté et la pièce se termine avec un double éclat retenu suivi d'une parfaite sérénité ; Extrait-Vidéo [création : 30 Novembre 1977, San Francisco (USA), par l'Orchestre symphonique de San Francisco, dirigé par Edo de Waart] | 13 | xxxx | ++++ | N |
Tanguy (Éric) | 1999 | Eclipse (orchestre) [31 ans] | Grand Orchestre (bois par 3, forte section de cordes, au total 86 musiciens). Un poème symphonique à la trame architecturale rigoureuse, en 5 parties enchaînées, métaphore (comme le titre l'indique) de la disparition et de la réapparition de la lumière (clarté-ombre, clair-obscur), avec l'incertitude de la catastrophe (fin en pirouette, se limitant à un trio à cordes). Une pièce aux timbres massifs, obscurs et métalliques, avec une belle puissance expressive, souvent d'atmosphère fantômatique, avec des contrastes forts mais contenus, de petites cellules rythmiques suspendues (mouvements de va-et-vient, flux-reflux, fort usage de la non-résolution, démarrages-pauses), avec quelques tutti exclamatifs. Elle est aussi faussement atonale (usage de modes harmoniques plus ou moins consonants) et joue sur la dualité des pupitres isolés alternés avec des groupes plus importants. Les 5 parties sont nommées, "L'Annonce" (prémices, mise en place de la dramaturgie), puis une 1ère "Méditation sur la Catastrophe" (une sorte de rêverie suspendue avec une accélération assez théâtrale, puis retour à l'attente), puis "La Catastrophe" par elle-même (annoncée quasi solennellement avec tourbillons moteurs, puis tourmentée où les cuivres et les percussions, essentiellement des timbales, ressortent davantage), une 2ème "Méditation sur la Catastrophe" (retour à la noirceur onirique et envoûtante), et enfin "Le Retour du Jour", sous forme de joie et d'apaisement (accelerando très progressif, timbres éclaircis, lumière pénétrante, sérénité retrouvée). La partition s'achève en forme d'ultime éclipse par un trio à cordes (violon, alto et violoncelle) dont le dernier accord, 'do-mi-do', constitue, d'après le compositeur, une sorte de pirouette esthétique puisqu'il sonne comme un accord parfait majeur alors que le 'sol', la note pivot de la grande section centrale de la pièce, n'est pas joué ; Extrait-Vidéo [création : 11 Août 1999, à l'occasion de la dernière éclipse du millénaire, dans le cadre du festival des Flâneries Musicales d'Été de Reims, sur le parvis de la Basilique Saint-Rémi (France)]) | 21 | xxx | +++ | . |
Tippett (Michael) | 1995 | The Rose Lake (orchestre) [90 ans] | Orchestre (grand). Une œuvre étonnamment vivante et inspirée pour un compositeur de 88 ans ; un poème symphonique en 12 mouvements complètement tonal (et rétro, comme Richard Strauss, mais pas post-moderne, le chromatisme et les timbres étant souvent inouïs), une pièce séduisante, lyrique, mariant les atmosphères sereines (apaisantes... il s'agit d'un lac et de la musique qu'il crée, en miroir avec le ciel), élégiaques, avec un art consommé de l'orchestration, de la mise en place, de la théâtralité et de la couleur ; la fin se termine par des pointillés, comme pour ne pas quitter cet endroit divin ; Extrait-Vidéo [création : 19 Février 1995, Barbican Hall, à Londres (Angleterre), par le London Symphony Orchestra, sous la direction de Colin Davis]. | 13 | xxx | +++++ | . |
Vivier (Claude) | 1976 | Siddhartha (orchestre) [28 ans] | Orchestre-grand (bois par 3-4, avec notamment 3 flûtes, 4 hautbois, 4 clarinettes, 3 basson, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, 1 tuba, 8 percussionnistes, en 8 groupes spatialisés autour du chef). Le titre de la pièce fait référence au célèbre roman éponyme d'Hermann Hesse (1877-1962) de 1922 (traduction Anglaise de 1951, seulement) ; elle est composée en Allemagne en 1975 et 1976 quand le compositeur suit les préceptes de Stockhausen, et compte tenu du charisme de Stockhausen, son influence est patente, par exemple dans la formule principale (l'esthétique de la formule est alors son cheval de bataille) tout comme dans l'habituel format appel-réponse, ou, dans la relation entre tempo et hauteur de note, et aussi dans la surenchère de la spatialisation (avec ici 8 groupes instrumentaux, contre 4 dans "Carré" de Stockhausen) ; la question de la paternité des beaux appels initiaux (ici 8, en rapport avec les groupes) qui ressemblent à s'y méprendre à des séquences répétées dans "Inori" de Stockhausen (créée en 1978, et apparemment composée à la même époque que "Siddhartha") sera laissée aux historiens musicologues, Stockhausen ayant souvent lui-même emprunté des idées à ses collègues compositeurs en omettant de le dire ; l'influence d'Alban Berg est également marquée tout en visant l'accessibilité et l'immédiateté (aux cours de Stockhausen, le compositeur côtoie alors Wolfgang Rihm, alors porte drapeau de la néo-simplicité) ; le mélomane averti peut gagner à la lecture de l'analyse approfondie d'un universitaire, Jean Lesage (format PDF : ici) ; après ces appels assez cérémonieux, la pièce se déroule de façon assez linéaire et statique avec tout à tour des évènements (interrogation-réponse-détente) qui se succèdent, chaque réponse étant peu à peu plus longue que la précédente (selon un mode processif-processionnel, un peu comme le roman dans lequel le héros se déplace avec une cour grossissante d'adeptes) ; syntaxiquement, la pièce est une monodie unique qui se transforme au cours de différents cycles de dilatations et contractions de ses intervalles (le matériau mélodique repose sur un ensemble de 6 échelles issues de la dilatation d'une gamme chromatique partant sur do dièse, en demi-tons, et même si la sonorité résultante fait penser à l'Orient ou au raga de la musique Indienne, la notation n'utilise pas de micro-intervalles) ; c'est l'une des pièces du compositeur parmi les moins tourmentées (mélancolique, presque sereine, zen, sans accroc notable) en liaison là encore avec le roman ; juste à la fin de la 1ère partie (point d'orgue) la pièce devient chatoyante avec un fourmillement de douces percussions, puis dans la 2ème partie le statisme s'accentue et l'absence de conclusion peu à peu apparaît inéluctable (comme dans le roman) ; Extrait-Vidéo [création : 14 Mars 1987, à Montréal, par l'Orchestre Métropolitain du grand Montréal (Canada), dirigé par Walter Bourdeau]. | 28 | xx | +++++ | N |
Xenakis (Iannis) | 1955 | Metastaseis (orchestre) [33 ans] | Orchestre (grand). Les clusters d'orchestre sont ici pour la première fois mis en place sous forme de blocs massifs aléatoires, résultant des 70 musiciens jouant 61 parties réelles, ce qui constitue un pari audacieux, avec un résultat sidérant de beauté et de complexité (le crescendo initial est magnétique) ; la partition comporte essentiellement des cordes (note : le titre de la pièce, qui signifie transformation, est souvent écrit "Metastasis", car initial, mais changé plus tard) ; Extrait-Vidéo [création publique : 16 Octobre 1955, au festival de Donaueschingen (Allemagne)]... de la même veine qualifiée de multi-phonique, "Pithoprakta", pour 50 musiciens, plus accessible, mais moins originale, et juxtaposant des moments clairs à des moments de désordre, avec progression géométrique. | 10 | xxxxx | +++ | . |
Xenakis (Iannis) | 1966 | Terretektorh (orchestre) [44 ans] | Orchestre-grand (bois par 3, 88 musiciens). Cette pièce unique est, selon le mot même du compositeur, un sonotron, parce que les musiciens (chacun jouant son instrument de prédilection plus 3 petites à main, 2 percussions et sifflets) sont dans la salle d'écoute dispersés et mélangés avec le public ; après un très long appel (presque 3 minutes, à peine chahutées par des cuivres), introductif aux cordes, continu mais assez vacillant et fluctuant (presque de la provocation, mais en fait voulu, pour se plonger dans cet inhabituel espace sonore), la pièce s'anime par un ostinato chaotique aux tuttis, une vrille montante (fracassée par les crépitements des percussions à clapet, d'abord comme une pluie cinglante, puis comme une pluie espacée, avec les tambours ajoutés) ; ensuite, un cheminement s'installe aux bois et vents (de couleur métallique), puis aux cordes (suraiguës) avec quelques percussions scintillantes voire brusques ; aux 2 tiers de la pièce, les vrilles et les pluies précédentes sont reprises auxquelles s'ajoutent des appels quasi-jazzy aux trombones (comme un chorus) et des effets de fusée (sifflets), au décours de long tenus ce qui, en concert, confère une sensation d'immersion unique et envoûtante, puis se succèdent des crescendos et decrescendos alternés jusqu'à une extinction tendue (avec point final surajouté) ; une expérience spatio-temporelle pour une pseudo-cacophonie organisée qui reste longtemps en mémoire et qui n'a pas pris de rides depuis sa création mouvementée ; Extrait-Vidéo [création : 3 Avril 1966, au festival de Royan (France)] | 17 | xxxx | +++ | N |
Xenakis (Iannis) | 1969 | Nomos Gamma (orchestre) [47 ans] | Grand Orchestre (au moins 98 musiciens, bois par 3 ou 4, voire pour les vents 5 ou 6 trombones, bassons, trompettes ou cors et surtout 7 percussionnistes, tous éparpillés dans le public, le chef étant au milieu de tous) ; une pièce courte, en un seul tenant, que l'on pourrait qualifier de stochastique, tant tout semble laissé au hasard (le compositeur a préféré dire à son bon vouloir), ce qui rend l'écoute difficile, au moins la première fois ; c'est une suite ininterrompue de séquences juxtaposant percussions et bois-vents, sous-tendues par les cordes dans un chaos total sans insupportable cacophonie, plutôt une permanente incertitude, voire un écroulement progressif jusqu'au vide ou en Anglais "void" (une véritable errance, mais dans un crescendo progressif) et c'est surtout une des premières études polyrythmiques pour orchestre depuis Varèse (et avec un tout autre style) ; la pièce met les cartes sur table d'emblée en contrastant une courte mélopée avec des coups de massues péremptoires aux percussions, sans lien apparent, puis tout en restant erratique, elle prend une dimension motorique, voire rituelle, puis ajoute fourmillements insidieux, staccatos perdus et péremptoires (même si l'oreille ne comprend toujours pas où le compositeur veut en venir) ; la recherche sur les couleurs est voulue originale (l'héritage d'Olivier Messiaen est tout proche), celle sur les rythmes semble toujours au bord de la rupture (il n'y a pas de cohérence apparente, pas de solution claire, il faut s'abandonner) ; en concert, pour le spectateur, la problématique clé consiste à déterminer son meilleur placement pour bénéficier de l'ensemble (un rituel caché, peu à peu dévoilé) sans perdre la sauvagerie (et sans avoir les oreilles submergées) ; Extrait-Vidéo [création : 4 Avril 1969, au Festival de Royan, par l'Orchestre philharmonique de l'ORTF dirigé par Charles Bruck (France)] | 15 | xxx | ++ | . |
Xenakis (Iannis) | 1974 | Antikhthon (orchestre) [52 ans] | Orchestre (grand, 86 musiciens). Intransigeance et rudesse caractérisent cette pièce (aux idées un peu datées) en 5 sections : une introduction, une 1ère moitié en 3 sections et une 2ème moitié d'un seul tenant, aboutissement et point culminant ; à l'origine conçue comme musique pour une chorégraphie de ballet de George Balanchine (projet abandonné, mais le scénario subsiste qui oppose 2 astres, le soleil et la terre, ou plus précisément l'anti-terre selon le titre), la pièce débute par une forme de sauvagerie énigmatique assez théâtrale et désordonnée, pour lentement évoluer par déclarations-scansions successives en se développant très peu (statisme, pseudo-répétitions) ; il y a 2 grands pôles, l'un principal, le Sol, l'autre secondaire, le Ré, traité à la manière d'une dominante du précédent ; une musique avec un impact direct et véhément, mêlant simplicité grandiose et complexité de l'écriture (nombreux clusters dans le grave et processus multiphoniques) ; à noter : tous les pupitres de l'orchestre sont éclatés géographiquement sur la scène (mais ne sont pas dispersés dans la salle comme dans "Terretektorh" et "Nomos Gamma") : par exemple, au 1er rang, clarinette, flûte, cor, violon, clarinette, 2 violons, 2ème rang, violon, trombone, trompette, alto, 4 violons, 1 clarinette, flûte, etc., d'où difficultés pour les instrumentistes qui n'ont plus de repère, mais une impression neuve au concert pour l'auditeur) ; Extrait-Vidéo [création : 21 Septembre 1974, à Bonn (Allemagne)]. | 22 | xx | +++ | . |
Xenakis (Iannis) | 1977 | Jonchaies (orchestre) [55 ans] | Grand Orchestre (au moins 106 musiciens, bois par 4 ou plus, et quelques 70 cordes). La pièce, hallucinante, d'un seul tenant et au titre évocateur (le fouillis des plantations de joncs) commence par un tutti mémorable en suraigus (un glissando ascendant de cordes) suivis de ponctuations fluctuantes, puis dérivantes (utilisation une échelle semblable au pelog Javanais), semble marquer le pas (en spirales pseudo-statiques) puis repart en accélérant et augmentant d'intensité mais sans converger vers un apex ; au contraire elle continue en ajoutant une dimension mécanique (ostinatos), de plus en plus frénétique ; on peut penser à un chaos qui se développe, à un fouillis inextricable qui ne s'arrête pas, mais la progression est maîtrisée et les fils enchevêtrés sont peu à peu dénoués pour faire apparaître une organisation (fragile), souvent perturbée par des soubresauts (visant un rituel) ; elle se termine par de magnifiques barrissements (éléphantesques) de cuivres, suivi de martellements et d'un souffle aux cordes (façon blizzard) avant de reprendre les barrissements qui s'éteignent progressivement dans le dialogue final entre 2 petits pipeaux suraigus et des petites cloches ; au total, la pièce est marquée par une polyphonie enchevêtrée, dense, complexe et fluctuante et par un affrontement violent des percussions et des cuivres, par les courbes montantes et descendantes de nappes de notes, par des accélérations inattendues, des jeux d'intensité, des séquences tendues alternant avec des flottements (cordes), et de colossales embardées ; comme le "Boléro" de Ravel, la pièce prend de plus en plus d'ampleur, jusqu'à devenir démesurée, à échapper à la logique, pour devenir jouissive et comme "Le Sacre du Printemps" de Stravinsky, elle frappe par la rythmique complexe (avec une part d'aléatoire) et par sa sauvagerie; Extrait-Vidéo ; [création : 21 Décembre 1977, Paris (France), mais certaines sources divergent] | 18 | xxxx | ++++ | N |
Zimmermann (Bernd Alois) | 1969 | Photoptosis (orchestre) [51 ans] | Orchestre (bois par 3). Une courte pièce (un prélude) inspiré par les fresques murales monochromes d'Yves Klein (plasticien Français, 1928-1962, innovateur par ses tableaux d'une seule couleur changeante et notamment son bleu outre-mer, «International Klein Blue») placées au Musiktheater im Revier de Gelsenkirchen ; elle fascine par son ambiance toute en atmosphères, en textures et en lumières variables ; toute en lenteur mesurée puis dilatée, elle est en un seul mouvement divisé en 3 sections ; elle commence dans une lumière blafarde, indistincte, sur des figures instables en quarts de ton (rôle majeur du pupitre des flûtes, par exemple) soutenues par de grands blocs sonores ; puis apparaissent de brèves citations ou des emprunts (parfois cryptés), avec la fanfare du début du 4ème mouvement de la 9ème Symphonie de Beethoven (également dans son "Requiem", comme une obsession), le 1er "Concerto Brandebourgeois" de Jean-Sébastien Bach, le ballet "Casse-noisette" de Tchaïkovski, le "Poème de l'Extase" de Scriabine, le premier thème du Prélude de "Parsifal" de Wagner, le "Veni Creator" du chant Grégorien ; enfin, un lent crescendo de tout l'orchestre s'amorce (ici le rôle de chaque pupitre de cuivres est majeur) par escalade progressive en maintenant une tension suspensive jusqu'à la photoptosis (l'apparition-pénétration de la lumière, en Grec, une allusion au mystère miraculeux de la Pentecôte) qui curieusement n'est ni délirante ni grandiloquente (la coupure est sèche, comme un coup de flash, sans fortissimo surajouté, comme si l'utopie du compositeur doit se terminer en résignation, si la religion doit se heurter à l'absurdité) ; Extrait-Vidéo [création : 14 Février 1969, à Gelsenkirchen (Allemagne)] | 12 | xxx | ++++ | N |
Actualisation : 23-Août-2024
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